(cet article a été rédigé à pour le dossier du film Smoke )
La ville de New-York, plus qu’aucune autre grande cité américaine, bénéficie d’une place particulière dans le cinéma américain : Jerome Charyn en a dénombré plus de 80 qui se déroulent dans l’agglomération, des années 1930 à nos jours et dans les genres les plus divers : la comédie, le film policier, la comédie musicale, le film fantastique ( parmi les autres villes, on peut quand même citer aussi San Francisco, où se déroule Vertigo d’Alfred Hitchcock, et qui sert de cadre aux aventures de l’inspecteur Harry, Chicago qui apparaît dans de nombreux films de gangsters comme Scarface de Howard Hawks,).
La cité new-yorkaise s’est d’abord imposée aux cinéastes par ses qualités photogéniques. Ses interminables gratte-ciels constituent un arrière-plan imposant : leurs lignes verticales permettent toutes sortes de combinaisons dans l’espace du plan (comme par exemple dans le générique de La Mort aux trousses d’Alfred Hitchcock…). Ce décor impressionnant est bien mis en valeur dans deux séquences légendaires . Dans West Side Story de Robert Wise (1961), la caméra survole la forêt des immeubles new-yorkais avant de plonger sur le quartier du West Side, où va se dérouler l’action du film. Manhattan de Woody Allen (1975) commence par une longue série de plans généraux de gratte-ciels, pris sous différents angles, avec en fond sonore Rhapsody in Blue de Gerschwin. New York a aussi inspiré bien des décorateurs, qui ont repris sous divers avatars, ses paysages géométriques : la cité futuriste de Metropolis, dans le film de Fritz Lang en 1926, la ville de Gotham City dans Batman, réalisé par Tim Burton en 1989…
Du Paradis à l’Enfer…
Mais la représentation de New York est ambiguë dans le cinéma américain : elle est la ville des paradoxes, des extrêmes : « tout y est possible : le succès, l’argent, l’immense fortune, les amours spectaculaires, les crimes abominables, les échecs homériques » (Paul Krease).
Elle est d’abord le symbole des promesses du rêve américain : elle constitue la première étape obligée pour les immigrants venus de tous les coins de la planète, s’installer dans le Nouveau Monde. C’est la statue de la Liberté, devant Manhattan, que découvrent d’abord l’Émigrant de Charlie Chaplin (1917) ou le jeune Grec d’America, America dans le film réalisé par Elia Kazan en 1963…Aussi, New York est le lieu où cohabitent et parfois fusionnent les peuples du monde : presque toutes les communautés et leurs quartiers ont eu « leur » film : les Juifs dans Hester Street , réalisé par Joan Silver-(1975) ou dans Une étrangère parmi nous de Sidney Lumet (1991), les Italiens de Little Italy dans plusieurs films de Francis Ford Coppola et de Martin Scorsese, les Chinois de Chinatown dans L’Année du Dragon de Michael Cimino (1985), les Russes de Brighton Beach dans Little Odessa de James Gray (1994) et bien sûr les Noirs, présents par exemple dans tous les films de Spike Lee…
C’est aussi à New York que se trouve le pouvoir économique : c’est dans cette ville qu’on peut réussir les ascensions les plus fulgurantes, en particulier dans le secteur financier…La puissance de l’argent, concentrée dans le sud de Manhattan a été souvent évoquée dans le cinéma américain, comme dans Wall Street d’Oliver Stone (1987) ou dans Working girl de Mike Nichols (1988). Les Yuppies de toutes les époques affichent leur insolente réussite dans les quartiers huppés, comme celui du Upper West Side (ainsi Audrey Hepburn dans Diamants sur canapé de Blake Edwards en 1961, Tom Hanks dans Le Bûcher des Vanités de Briam de Palma-1991-).
Mais la ville de New York est aussi dans le cinéma américain le lieu de tous les dérèglements. Elle concentre sur elle toute l’animosité anti-urbaine de l’Amérique : « la fiction américaine a toujours fait de la ville un lieu de perdition synonyme de réussite matérielle certes, mais aussi et surtout d’échec spirituel (…) Le citadin vu par Hollywood est un être qui étouffe. Né au pays des grands espaces, il ressent l’appel du large » (Michel Cieutat). Et comme New York est La Ville Américaine par excellence, elle est vite devenue la cible idéale…
Déjà, le pouvoir urbain (police, classe politique locale, presse) est décrit comme foncièrement corrompu et violent : plusieurs films des années 1950 décrivent ainsi la métropole américaine , comme dans L’Enfer de la corruption d’Abraham Polonsky (1948), La Cité sans voiles de Jules Dassin (1948) ou Le Grand Chantage d’Alexander MacKendrick (1957). Plus récemment, Sidney Lumet a consacré plusieurs films sur ce thème, et City Hall réalisé par Harold Becker (1995) , reprend le sujet (c’est une allusion à peine voilée à la gestion de la ville par le Maire Ed Koch)…La réussite insolente de certains s’accompagne d’une misère extrême, dénoncée dans plusieurs films, en particulier ceux des années 1930 (The Bowery de Raoul Walsh en 1933, Rue sans issue de William Wyler en 1937)…Et on ne manque pas d’insister sur la dangerosité de certains quartiers : dans deux films récents, on retrouve la même situation : un yuppie plongé dans l’enfer des bas fonds (Tom Hanks dans le Bronx, dans Le bûcher des Vanités, Griffin Dunne dans SoHo dans After Hours de Martin Scorsese…). Le monde des marginaux, drogués, freaks en tout genre, qui peuplent ces lieux mal famés est souvent montré à l’écran, avec parfois une certaine complaisance.. Cette « faune » urbaine plus ou moins pittoresque apparait dans Macadam Cowboy de John Schlesinger (1969), Panique à Needle Park de Jerry Schwartzberg (1971) ou New Jake City de Mario Van Peebles (1991)…
Cette « cité infernale » est souvent le cadre de récits cauchemardesques : c’est l’Empire State Building qu’escalade King-Kong dans le célèbre film de Merian C. Cooper et d’Ernst B. Schoedsack (1933) (dans la version de 1976, le monstre choisit le World Trade Center…). Dans New York 1997 (1981), John Carpenter imagine un Manhattan en proie à une criminalité galopante et transformé en prison de Haute Sécurité (mais est-ce de la Science Fiction ?… ). New York est même parfois « punie » (pour ses péchés..?) : elle est ainsi rayée de la carte par une explosion atomique dans Fail Safe de Sidney Lumet (1964 ) ou dans La Planète des Singes de Franck Schaeffner (1968)….
Des cinéastes new-yorkais
Dans les années 1970 et 1980, plusieurs réalisateurs qui ont vécu et vivent encore à New York, ont proposé des visions plus personnelles de la métropole américaine…
Woody Allen semble par excellence « l’Homo Manhattanus » : il est né et a vécu dans le quartier de Brooklyn : il habite maintenant au cœur de Manhattan. La plupart de ses films s’y déroulent : Annie Hall (1977), Manhattan (1979), Broadway Danny Rose (1984), Hannah et ses sœurs (1986), Radio Days (1987), Meurtre Mystérieux sur Manhattan (1993), Tout le Monde dit I love you (1997)…Les escapades de ses personnages en dehors de New York sont rares (on peut signaler quand même le divertissement bucolique de Comédie érotique d’une nuit d’été réalisé en 1982…). Ces infidélités à la « grosse pomme » se finissent souvent assez mal : dans Annie Hall, le héros du film fait « une courageuse percée à Los Angeles, qui se termine par une crise existentielle » (Anne Gillain). Isaac Davis, dans Manhattan, interprété par le cinéaste, « ne peut fonctionner en dehors de New York »…Le réalisateur a avoué sa fascination pour sa ville, mais c’est un amour sélectif…Sa géographie de New York se limite à un quartier bien défini, en gros le Upper West Side, entre la 70° rue au Nord et la 53° au Sud, la 6° Avenue à l’Est et la 2° à l’Ouest…Cet espace allenien est balisé par quelques endroits clés : le Lincoln Center, le restaurant Elaine’s, Broadway, les magasins Bloomingdale…Le point de vue de Woody Allen est aussi empreint de nostalgie : « j’ai une vision romantique de cette ville . Je l’ai toujours aimé comme un membre de la famille, dont on a tendance à souligner les vertus et gommer les défauts ». Aussi, il avoue bien volontiers avoir chercher à arranger les choses. A propos de Manhattan, Woody Allen explique : j’ai tout fait pour rendre la ville délibérément séduisante. Je sais que s’asseoir sous le pont de Brooklyn à 2 ou 3 heures du matin, comporte des risques ou se balader en calèche à Central Park (…) Mes films décrivent le New York de mes rêves, de mes vœux, parfois de mes souvenirs »…Ainsi, New York est plus rêvée que décrite par le cinéaste : « cocon matriciel et bienveillant, la ville est ici dépouillée de sa réalité socio-économique : on n’aperçoit de tout le récit, la moindre minorité raciale américaine ni l’ombre d’un SDF. Manhattan se présente comme une ville qui accueille, abrite, protège, et nourrit des habitants toujours propres, polis, et argentés. Ses lieux publics sont bien fréquentés, ses rues rutilantes et dépourvues de violence » (Anne Gillain). Cette vision idéalisée lui est d’ailleurs reprochée par certains cinéastes comme Spike Lee qui l’accuse d’avoir occulté complètement la présence pourtant évidente de la communauté noire à New York…
Martin Scorsese est un autre cinéaste profondément marqué par son appartenance à la grande cité américaine. Né dans le Queens, il vient s’installer très jeune avec sa famille dans Elisabeth Street, au coeur de Little Italy...Comme Allen, il est fasciné par New York, et la plupart de ses films importants s’y déroulent : Mean Streets (1973), sans doute son œuvre de fiction la plus autobiographique, Taxi Driver (1976), New York-New York (1977), Raging Bull (1980), La Valse des Pantins (1983), After Hours (1985), Les Affranchis (1990). Pour Scorsese, la ville est un formidable réservoir d’images et d’idées : « c’est ici que je trouve mon inspiration et ma dynamique. Il me suffit de sortir de chez moi pour absorber cette énergie qui déferle sur moi comme une décharge d’adrénaline ». Le cinéaste possède d’ailleurs une aptitude particulière à filmer la cité, avec ses mouvements frénétiques, ses sons assourdissants ou stridents . Paul Schrader, le scénariste de Taxi Driver parle de « son sens de la vibration, son sens de la ville »…New York est aussi un cadre idéal pour les personnages angoissés de Scorsese : « (elle) présente des pièges qui minent les anti-héros scorsesiens (…) Aucun n’échappe à la ville. Plus on fuit, plus les pièges urbains se referment sur vous (…). Oppressés par la ville, ses personnages suffoquent artificiellement » (Michel Cieutat). Le chauffeur de taxi, interprété par Robert de Niro dans Taxi Driver parcourt en tout sens les rues de la ville, comme s’il était pris dans une nasse…Parfois, la vision de Scorsese est plus souriante. Dans After Hours, le personnage incarné par Griffin Dunne vit une nuit de cauchemar dans le quartier de Soho (=South Houston Street). mais, ses mésaventures sont bien dérisoires et sont traitées comme une « farce du subconscient », à la limite du rêve…Pour une fois, Scorsese tourne ses angoisses en dérision…: »il s’est moqué de ses hantises personnelles qui sont celles de l’Amérique. Écrasement de l’individu par la ville molochéenne, alors que le rêve américain de Thomas Jefferson avait prôné la vie dans la nature » (Michel Cieutat). Comme on le sait, cette obsession du cinéaste pour New York se retrouve dans des films plus récents, comme A tombeau ouvert ou Gangs of New York. Dans ce dernier film, il s’intéresse aux débuts d’un New York préhistorique, d’avant la modernité mais déjà marqué par la violence et les conflits ethniques (les natives s’opposent aux immigrants irlandais…)…
Spike Lee est la tête de file des cinéastes afro-américains, apparus dans les années 1980 : il est aussi très attaché à la ville où il a été élevé : s’il est né à Atlanta en Géorgie, il a passé sa jeunesse à Brooklyn dans le quartier noir de Bedfort-Stuyvesant (= Bed-Stuy), où se déroule l’action de son film Do the right thing (1989). A l’instar de ses collègues new-yorkais, la plupart de ses films ont été filmés dans le même cadre urbain , de Nola Darling (1986) à Girl 6 (1996), en passant par Mo’ Better Blues (1989), et surtout Crooklyn (1994), qui raconte son enfance heureuse dans un Brooklyn plutôt rose…Spike Lee s’est d’ailleurs vu critiqué pour sa vision presque idyllique du ghetto. Dans Do the right thing, les petites maisonnettes de Bed-Stuy ont un aspect propret et bien léché, la peinture de la communauté est haute en couleur, à la limite du cliché et ce tableau a été jugé peu crédible par beaucoup. Le cinéaste s’est vigoureusement défendu : « on m’a accusé d’avoir assaini la communauté, de l’avoir montré dénuée de voyous, de délinquants et de drogue. Bed-Stuy n’en a ni plus ni moins que n’importe quelle autre partie de la ville ». Lee affirme avoir voulu refuser « toute noirceur exotique » : la pire insulte qu’on pourrait lui faire serait de voir en lui un « Woody Allen noir », qui rêve son ghetto comme le réalisateur juif sublime son Manhattan…
Ces trois cinéastes, issus de minorités plus ou moins bien intégrées à la société américaine, entretiennent des rapports particuliers avec « leur » ville : la fascination qu’ils éprouvent pour New York a été féconde pour leur travail cinématographique…
Brooklyn point of wiew
Smoke, le film de Wayne Wang et écrit par Paul Auster, s’inscrit donc dans une longue lignée… Mais, il est à plusieurs titres est en décalage par rapport aux autres films « new-yorkais » qui l’ont précédés…La première image de Smoke est celle du pont de Brooklyn, mais vu de l’autre rive avec en arrière-plan, les gratte-ciels de Manhattan : autant dire le plan inverse de celui si célèbre du film de Woody Allen. Le film de Wang prend ses distances avec le centre-ville et s’inscrit résolument dans le quartier de Brooklyn, si cher au cœur de Paul Auster, auteur du scénario…L’écrivain insiste sur le caractère particulier de ce secteur de New York où il vit depuis plus de 20 ans…D’abord, c’est un des quartiers les plus étendus et les plus peuplés -184 km², 2,3 millions hb- (s’il était détaché du reste de l’agglomération, Brooklyn serait la quatrième ville des États-Unis…). Il a aussi une histoire originale, car il a accueilli plusieurs vagues d’immigrants. On y trouve des Russes à Brighton Beach, les Haïtiens de Crown Heights, les Juifs du Pont de Williamsburg, les Italiens de Bensonhurst et de Coney Island…On y découvre les plus anciennes maisons de New York, datant du début du XIX° siècle…De nombreux écrivains y ont résidé (en particulier à Brooklyn Heights) : Thomas Wolfe, Truman Capote, Norman Mailer, Arthur Miller, Carson Mac Cullers… Auster lui-même s’est installé dans le quartier de Park Slope, ainsi décrit par Gérard de Cortanze : « victorien et désuet, moitié Londres et moitié Bruxelles avec ses petites maisons à pilastres et escaliers ornés de balustrades en fer forgé, longeant le Prospect Park West« .
L’action de Smoke se déroule essentiellement dans cette partie de Brooklyn. Le magasin de cigares d’Auggie se trouve à l’angle de le 3° rue et de la 7° avenue et l’appartement de Paul Benjamin est à quelques blocs du carrefour…Quelques scènes seulement se situent en dehors de ce cadre : le taudis sordide où vit la fille de Ruby, le quartier noir de Boerum Hill d’où vient Rashid et où habite la tante de Roger Goodwin, la station-service de Cyrus Cole à Peeksvill…
Le paysage brooklynien est avant tout horizontal , les maisons dépassent rarement quelques étages. Comme le remarque Auster, « autant Manhattan est vertical, autant Brooklyn est plan et couché ». L’individu n’est pas écrasé par d’imposants gratte-ciels, les bâtiments sont à la mesure de l’homme. D’ailleurs les personnages font preuve d’une humanité qu’on ne trouve pas ailleurs dans la grande cité. Les hommes et les femmes de « ce coin d’univers » comme dit Auggie, n’ont pas la dureté et le cynisme qu’on attribue généralement aux New-Yorkais… Ils sont souvent « socialement incorrects » : ils affichent un goût prononcé pour le tabac, et apprécient même les cigares cubains ! Cette attitude est insolite en un temps où les lobbies anti-tabac tiennent le haut du pavé (au début du film, Auggie semble même craindre qu’on ferme sa boutique…). Les habitants font preuve de solidarité et de convivialité. Quand Paul propose au jeune Noir de l’héberger gratuitement, Rashid s’étonne : « les gens ne font pas ce genre de chose. pas à News York »: et l’écrivain de répliquer : »je ne suis pas les gens, je suis moi ». Auggie semble avoir une épaisse carapace de cynisme et de dureté : en fait, il sait aussi se montrer généreux et humain en de nombreuses occasions. Quand Ruby le sollicite pour aider sa fille Felicity, il finit par l’accompagner et lui remet 5000$ pour la faire désintoxiquer…
Même les rapports inter raciaux semblent différents : le jeune Noir Thomas Cole adopte un prénom arabe, comme pour mieux se distinguer et affirmer son afro-centrisme…Mais quelque temps plus tard, il revendique la paternité de l’écrivain blanc Benjamin, alors que leurs liens de parenté ne semblent pas évidents…Quand Rashid évoque le quartier de Boerum Hill, d’où il est originaire, il précise à l’écrivain : « c’est une autre galaxie. Noir c’est noir et blanc c’est blanc, et jamais les deux ne se rencontrent ». Paul réplique « qu’il lui semble qu’ils l’ont fait dans cet appartement ». Le petit monde de Brooklyn est multiracial, mais sans tension apparente. Après la malheureuse histoire des cigares cubains inondés, Rashid apostrophe Auggie (« Va te faire foutre, espèce de sale Blanc »), mais c’est juste histoire de le remercier amicalement…Pour Paul Auster, « ce doit être un des lieux les plus démocratiques et les plus tolérants de la planète. Tout le monde habite là, des gens de toutes les races, de toutes les religions et de toutes les classes sociales et tout le monde s’entend plutôt bien. Étant donné le climat actuel dans le pays, je dirais que ça tient du miracle… » D’ailleurs, l’écrivain s’est amusé et réjoui du cosmopolitisme de l’équipe qui a réalisé le film : un producteur et un scénariste juifs, un metteur en scène d’origine chinoise..
Cette vision des relations entre races est aux antipodes de celle d’un Spike Lee, beaucoup plus pessimiste. Le cinéaste afro-américain a abordé le sujet dans quasiment tous ses films et notamment dans Do the right thing, dont l’action se déroule aussi à Brooklyn…Mais, l’approche est radicalement différente. Ainsi, quand un Blanc s’aventure dans le quartier noir, il est pas vraiment le bienvenu et l’atmosphère n’a rien à voir avec les relations bon enfant que semblent entretenir les différentes races dans la boutique d’Auggie. L’action des deux films se focalise à un carrefour : près de la pizzeria de Sal dans celui de Spike Lee, et dans l’œuvre de Wang, là où se trouve le magasin de cigares…Mais, l’endroit n’a pas la même signification. Dans Do the right thing, le carrefour est clairement le lieu de l’affrontement entre les races, notamment dans la séquence de l’émeute à la fin du film. Par contre, l’intersection où se situe la boutique de la Brooklyn Cigars Co est un point de convergence, de rencontre, peut-être même de fusion entre les communautés (sans même parler de melting-pot…). On mesure ainsi la distance qui sépare les visions des deux cinéastes…Ainsi, le film de Wayne Wang donne une image décalée, presque apaisée d’un quartier de New York, bien loin des descriptions névrotiques de certains cinéastes.. On peut s’interroger sur l’authenticité sociologique de Smoke. Mais cette vision humaniste de la grande ville est assez rare dans la filmographie consacrée à New York pour être relevée…
-Woody Allen, Manhattan, Cahiers du cinéma, 2000
-Michel Cieutat, Martin Scorsese, Rivages, 1986
-Patrick Brion, Martin Scorsese, La Martinière, 2004
-Moussa Djigo, Spike Lee, pour une esthétique de la subversion dans Do the right thing, Acoria, 2006
-Anne Gillain, Manhattan, Nathan Synopsis, 1997
-Jean-Philippe Guerand, Woody Allen, Rivages, 1989
-Martin Scorsese, Gangs of new York, l‘aventure d’un film, Cahiers du cinéma, 2002
-Martin Scorsese, entretiens avec Michael Henry Wilson, Cahiers du cinéma , 2005
–Cités-Cinés, Ramsay, 1987
–New York contre NY : une mosaïque éclatée, Autrement, 1992
–Architectures, décor et cinéma, sous la direction de Françoise Puaux, Cinémaction n°75, Corlet-Télérama, 1995
voir aussi la filmographie sur New York au cinéma