Good Bye Lenin !, un film de Wolfgang Becker
Allemagne, 2h 01, 2001
Interprétation : Daniel Brühl , Katrin Sass , Maria Simon
Synopsis :
Allemagne de l’Est, 1989…Un jeune homme, Alexender Kerner s’oppose au régime en place…Par contre, sa mère est une communiste fervente. Quand elle apprend l’arrestation de son fils, elle est frappée par une crise cardiaque et sombre dans le coma…
Quelques mois plus tard, comme on le sait, la situation s’est radicalement transformée…L’Allemagne de l’Est n’existe plus. Mais les consignes des médecins sont claires : il faut éviter tout traumatisme à Mme Kerner, dont le cœur est encore fragile. Aussi Alex décide de faire…comme si rien n’avait changé ! La RDA continue d’exister dans les 80 m² de l’appartement des Kerner…
Ce film, réalisé par un réalisateur de l’Ouest, a connu un grand succès, à la fois populaire et critique outre-Rhin : plus de 6 millions de spectateurs l’ont déjà vu en Allemagne et il a reçu de nombreux prix (dont le Blue Angel au festival de Berlin de 2003). Sans doute, Goodbye Lenin profite-t-il d’une certaine nostalgie pour l’Est…Mais surtout, il a su trouver le ton juste, grave et ironique, pour évoquer un passé pas si lointain et réconcilier les habitants des deux Allemagnes en leur proposant une vision consensuelle de la réunification.
Good Bye, Lenin !
Au delà de l’ostalgie…
Ostalgie ,quand tu nous tient
Comme on le sait, Good Bye Lenin a obtenu un succès critique et populaire considérable outre-Rhin : près de 6 millions de spectateurs l’ont déjà vu et il a été distribué dans plus de 600 salles (soit autant que Terminator 3). Alors que le public est plutôt séduit par les grosses productions hollywoodiennes, il a cette fois plébiscité ce film allemand, qui a raflé nombre de récompenses internationales. Good Bye Lenin a aussi connu une audience importante dans d’autres pays européens, et en particulier en France (les lecteurs de Télérama l’ont désigné comme film de l’année 2003…).
Ce film n’est d’ailleurs pas le premier en Allemagne à s’être intéressé à ce problème de la réunification et à la vie dans l’ancienne RDA. D’autres réalisateurs, sur des registres très variés, ont récemment abordé cette période de l’histoire de leur pays. Sur un ton plutôt académique, Margaret Von Trotta raconte les aventures d’un couple, Sophie et Konrad, séparé par l’Histoire, dans Les années du mur (1994). Un autre cinéaste confirmé, Volker Schlöndorff, fait le récit dans Les trois vies de Rita Vogt (1999) de l’exil d’une terroriste de la fraction Armée rouge en Allemagne de l’Est (au passage, il montre comment certains de ces militants ont été manipulés par la Stasi). L’insaisissable, un film d’Oskar Röhler sorti en 2000, évoque, de manière acerbe, l’histoire d’une intellectuelle de la RFA, qui vit difficilement les évènements de novembre 1989. Roland Suso Richter, dans un style presque hollywoodien, décrit dans Le Tunnel (2001), l’aventure de quelques jeunes gens qui, dans les années 1960, creusent une galerie sous le mur de Berlin. Dans Berlin is in Germany (2002), Hannes Stohr raconte les difficultés d’un Ossi, sorti de prison 10 ans après la chute du Mur. Grill Point d’Andreas Dresen (2003) est une comédie sur l’adaptation laborieuse des habitants de Francfort sur Oder au système capitaliste… En 2000, sur un sujet proche de Good Bye Lenin, Leander Haussmann, réalisateur venu de l’Est, adapte à l’écran un roman de Thomas Brussig, Sonnenallee, qui raconte sur un ton satirique, l’histoire d’une bande d’adolescents de Berlin-Est aux prises avec les «mirages de l’Occident». : le film avait déjà obtenu un grand succès auprès du public (2,7 millions de spectateurs l’année de sa sortie).
Ainsi, le film de Wolfgang Becker n’est pas le premier sur ce thème mais son succès surprenant en a fait un «phénomène de société». La presse germanique estime qu’il est le symbole de ce qu’on a appelé l’ostalgie (ou un goût nostalgique pour l’ancienne Allemagne de l’Est). Cette vogue qui se développe depuis quelque temps déjà, prend les formes les plus diverses, pour le meilleur et pour le pire. Dans cette dernière catégorie, on peut indiquer les boutiques des anciens quartiers de Berlin-Est, où l’on vend des tee-shirts marqués du sigle DDR ou FDJ (les jeunesses communistes de la RDA), des CD d’anciennes gloires de la chanson est-allemande et autres colifichets plus ou moins kitsch (en particulier, des cassettes vidéo d’actualités de la télévision d’État! : dans le film Good Bye Lenin, la mère d’Alex regarde avec ferveur l’émission «Actuelle Kamera» sur la télévision est-allemande… ). On peut aussi évoquer les nouvelles émissions de télévision sur RTL (Die DDR show) ou sur la ZDF (Ostalgie-Show), qui évoquent avec une certaine complaisance le «bon vieux temps» de la RDA (l’une d’elles est présentée par l’ancienne championne de patinage artistique, Katarina Witt). On peut aussi mentionner les visites guidées sur les «lieux de mémoire» de Berlin-Est, les ostalgia tours, organisés par l’office du tourisme de la ville (le circuit comprend la conduite d’une Trabant, les fameuses voitures produites en Allemagne de l’Est). On parle même de la construction d’un parc à thème sur le sujet, qui devrait ouvrir dans la capitale allemande en 2004 (avec poste-frontière, gardes, magasins peu achalandés…). Plus sérieusement, certains auteurs ont évoqué, de manière sensible, leur propre jeunesse dans l’ancienne RDA , et leurs livres ont trouvé une audience certaine (par exemple, Claudia Rusch qui a écrit Ma libre jeunesse allemande ou Jana Hensel qui raconte son enfance dans Enfants de la zone ). Récemment, une grande exposition a aussi été organisée à Berlin sur l’art dans la RDA (Kunst in der DDR), qui a connu un réel succès auprès du public. Elle a permis de montrer que les artistes de l’ancien pays communiste ont réussi, malgré les interventions de l’État, à conserver une certaine autonomie (on a même pu relever une certaine convergence entre les mouvements artistiques des deux Allemagnes : la plupart de ces artistes en effet partagent les mêmes obsessions, à propos de l’ héritage de l’époque nazie…). Enfin, on peut même constater que l’historiographie progresse sur ce sujet : en août 2003, un ouvrage de synthèse de 550 pages a été publié sous la direction de l’historien Jurgen Kokca, de l’université libre de Berlin, et qui aborde tous les aspects de l’ancien régime de la RDA.
Cette mode parfois excessive ou superficielle a exaspéré certains ressortissants de l’ancienne RDA. Ainsi, le cinéaste Leander Haussmann s’est insurgé contre cette vision de l’Allemagne de l’Est qui en fait «la petite dictature la plus rigolote de tous les temps»… Comme le déplore le réalisateur de Sonnenallee, «la RDA finit par devenir un produit de plus en plus artificiel. C’est désormais un label pour jeunes freaks et puristes à la recherche du grand frisson perdu, une référence pour esprits romantiques entre kitsch et révolution». Et de fait, il serait bien sûr hors de propos de faire de la RDA un «pays de conte de fées» : Leander Haussmann soupçonne même certains anciens responsables de se servir de cette mode pour s’en tirer à bon compte. Il s’étonne ainsi de «l’autosatisfaction de tous ceux qui ont participé au système déchu et qui pensent que la honte est définitivement révolue». Les aspects les plus déplaisants du régime font encore la une des médias allemands. Très récemment, le célèbre journaliste Günter Wallraff, auteur du best-seller Tête de Turc, a été accusé d’avoir collaboré avec la police politique d’Allemagne de l’Est à la fin des années 1960 (la Stasi comprenait 100 000 fonctionnaires, sans doute plus de 180000 I.M, c’est à dire des collaborateurs «officieux». Depuis l’ouverture des archives en 1992, plus de 10 000 personnes viennent consulter leurs propres dossiers chaque mois…). Dans le film de Wolfgang Becker, la mère d’Alex subit des interrogatoires serrés des policiers de la Stasi, lorsque son mari part se réfugier à l’Ouest.
Les désillusions de la réunification
Le film de Wolfgang Becker évite les excès de l’ostalgie et ne tombe pas dans le piège de la complaisance envers le régime est-allemand. Par exemple, les personnages de Goodbye Lenin ont une attitude ambiguë envers le régime communiste. La mère d’Alex elle-même est d’abord présentée comme une militante dévouée et enthousiaste: mais il s’avère par la suite que sa personnalité est bien plus complexe. Son zèle peut s’expliquer par des motivations pas seulement politiques. Comme le remarque le journal Frankfurter Allgemeine Zeitung, «se dessine, en toile de fond particulièrement acerbe, le double jeu de la société est-allemande (…). C’est exactement ce que fut la RDA : le règne du double voire du triple jeu, où, dans le meilleur des cas, la vérité se lisait entre les lignes».
Mais surtout, ce film, pourtant réalisé par un Wessi authentique, traduit bien le malaise de la population de l’ancienne Allemagne de l’Est. Il est bien certain que beaucoup d’entre eux ont éprouvé une certaine déception après dix ans de réunification. Un fois passée l’euphorie des premiers mois, l’Allemagne doit affronter l’immense chantier de la réunification sociale et économique du pays (il est entendu que le système politique de la RDA doit disparaître sans laisser de traces). C’est l’époque des promesses, et le chancelier Helmut Kohl, principal artisan du processus, déborde alors d’optimisme: il parle à ses nouveaux compatriotes des «contrées fleurissantes» (blühende Landschaffen). Il accorde un taux de change particulièrement avantageux à la monnaie est-allemande (elle s’échangera à un pour un, alors qu’avant 1989, le taux officieux était de 7 pour 1…). Dans le film, Alex vient un peu trop tard à la banque pour venir échanger l’argent soigneusement conservé par sa mère… en marks de l’Est! Le dirigeant chrétien-démocrate estimait même que la réunification pouvait se faire sans augmenter les charges pesant sur les citoyens de la nouvelle Allemagne.
En fait, au point de vue économique et social, la situation est très difficile, surtout les premières années. La production industrielle dans l’ancienne RDA s’effondre et perd 50 % de sa valeur en deux ans. Le poids financier de la reconstruction des nouveaux Länder s’avère être bien plus important que prévu. Près de 100 milliards de DM sont affectés chaque année à l’économie de l’ancienne Allemagne de l’Est (un Fonds spécial pour l’unité de l’Allemagne a été créé entre 1990 et 1995). Alors que le budget du pays était en encore en excédent en 1991 ( plus de 21 milliards DM), il devient déficitaire en 1997 de près de 91 milliards de DM. Ainsi, les charges fiscales deviennent plus lourdes au cours de la décennie. De fait, tout l’ancien appareil industriel qui faisait la force de certaines villes est-allemandes comme Dresde ou Leipzig, est durement affecté par les restructurations imposées par le gouvernement allemand. La Treuhandanstadt, l’organisme mis en place en 1990 pour prendre en charge les entreprises des nouveaux Länder, procède à la privatisation de 65% d’entre elles et la liquidation de près de 30%. Ainsi, sur les 4 millions d’emplois, seulement un million est préservé. Le chômage dans l’ancienne Allemagne de l’Est connaît donc une forte progression au cours des années 1990 : il est toujours près de deux fois supérieur à celui qui existe à l’Ouest (en 1998, il s’élève à 19,5% dans l’ex-RDA, contre 10,5% dans l’ex-RFA). Dans Good Bye Lenin, l’atelier vieillot où travaillait Alex, est fermé, mais le jeune homme retrouve rapidement un emploi dans l’entreprise «X-TV», qui vend des antennes paraboliques : tous les anciens travailleurs de la RDA n’ont pas eu les mêmes capacités d’adaptation et n’ont su adopter le même rythme de travail (la productivité à l’Est est toujours restée nettement inférieure à celle de l’Ouest).
Dans cette intégration économique à marche forcée, tout est difficile pour les nouveaux habitants de la nouvelle Allemagne. Certes, leurs salaires ont augmenté mais leur pouvoir d’achat reste insuffisant pour s’offrir tous les produits nouveaux auxquels ils peuvent maintenant accéder (d’autant que la hausse des prix a été d’abords été brutale : l’électricité voit ses tarifs tripler la première année de la réunification…). Dans Good Bye Lenin, plusieurs séquences évoquent cette situation. Lorsque la mère d’Alex sort de chez elle à l’insu de son fils, elle est éberluée par le ton agressif des affiches publicitaires qu’elle voit dans la rue (sans parler de sa stupéfaction devant un panneau sur le mur d’en face pour vanter une très célèbre marque de boissons d’un pays capitaliste!). D’autre part, beaucoup d’Ossis regrettent les avantages sociaux que leur procurait l’ancien régime communiste. C’est notamment le cas pour les femmes de l’ancienne RDA (80% d’entre elles travaillaient…) alors qu’elles sont les premières victimes du chômage apparu dans les Länder de l’Est (54% n’ont plus d’emploi contre 44% à l’Ouest). Certes, le plein emploi dans l’ancien pays communiste était souvent une illusion, entretenue par une productivité très basse, mais les travailleurs bénéficiaient de prestations sociales gratuites ou à bas prix (pour les crèches, les vacances, ou le logement..). Certains estiment aussi que la législation de la RDA, par exemple sur l’interruption volontaire de grossesse, était nettement plus avancée que celle de l’Ouest. Au total, ce malaise social s’est traduit par une forte diminution du taux de natalité dans les nouveaux Länder (il a été divisé par deux depuis la réunification).
Cette désillusion s’est traduite par une situation politique parfois confuse dans l’ex-RDA. Certes, les deux grands partis se taillent la part du lion: le SPD et la CDU ont obtenu ensemble près de 70% des suffrages dans les nouveaux Länder au cours des années 1990. On est quand même frappé par certains phénomènes. Ainsi, les anciens communistes restent influents : le PDS néo-communiste, héritier du SED, l’ancienne organisation dominante en RDA, est le parti qui compte le plus de militants (près de 130 000): il a obtenu des scores variables au cours des années 1990 mais il est toujours la troisième force politique à l’Est (il recueille 16% des suffrages en mars 1990, 9,9% quelques mois plus tard : il obtient 20% en 1994, mais 1% à l’Ouest). Ses résultats sont particulièrement probants à Berlin : il a atteint jusqu’à 40 % des voix dans certains quartiers Est de la ville . Depuis quelque temps, le PDS participe même à l’équipe menée par le SPD qui dirige la capitale allemande. En 1994, un sondage réalisé dans l’ancienne RDA indiquait que 70% de la population jugeait que le socialisme était une bonne idée mais qu’elle avait été mal appliquée…. A l’autre bout de l’échiquier politique, l’extrême-droite a profité de la frustration de certains habitants d’Allemagne de l’Est. Tous les observateurs ont noté la multiplication des attentats racistes et xénophobes, au cours des années 1990, dans certaines villes de l’ex-RDA, particulièrement touchées par le chômage (les plus graves se sont déroulés à Hoyerswerda en Saxe en septembre 1991 et à Rostock en août 1992 : à chaque fois, des foyers de travailleurs étrangers, notamment vietnamiens, étaient la cible des émeutiers). Ces groupes de jeunes néo-nazis semblent avoir manifesté avec le soutien au moins tacite d’une partie de la population locale… Enfin, on peut relever les hésitations, voire les maladresses du pouvoir politique quant à l’attitude à adopter vis à vis des anciens responsables de la dictature communiste, de Marcus Wolff à Erich Honecker, en passant par Egon Krenz. Qui faut-il poursuivre? A quel niveau de responsabilité fixe-t-on la barre? Certains procès ont été presque surréalistes : Erich Mielke, ancien chef de la Stasi, a été condamné pour le meurtre de deux policiers commis en…1931! Des gardes de la police est-allemande ont été jugés en 1997 pour avoir tiré sur des fuyards qui tentaient de franchir le mur de Berlin: ils estimaient, quant à eux, n’avoir fait que leur devoir….
Une incompréhension réciproque
Aussi, le malaise est certain, et il semble être né d’une double incompréhension : les Allemands de l’Ouest jugent leurs nouveaux compatriotes, «geignards», toujours avides de subventions, peu productifs… A l’inverse, les Ossis considèrent les Wessis comme des gens arrogants, trop sûrs d’eux (des Allesbesserwessis, des «Monsieur je sais-tout»). En particulier, les anciens Allemands de l’Est ont mal supporté d’avoir été intégrés sans qu’on prenne en compte leur propre histoire. Ils ont eu le sentiment désagréable d’être obligés d’occulter leur passé, d’avoir à le renier sans même en faire l’inventaire. Comme le dit le scénariste de Good Bye Lenin Berndt Lichtenberg, «il faut imaginer le désarroi à l’Est : même si personne ne croyait plus vraiment à l’Utopie socialiste, voir en si peu de temps tous ses repères jetés aux poubelles de l’histoire, c’est forcément se sentir dépossédé de sa propre existence». Et ce d’autant plus que tous les anciens Allemands de l’Est n’acceptent pas sans discussion les valeurs du système capitaliste occidental, même dans sa version «tempérée» social-démocrate…. Danièle Dahn s’insurge : «ce n’est pas pour ce modèle d’un capitalisme rongé par la crise que nous sommes battus, ni pour ce genre de justice empoisonnée par la double morale des Allemands de l’Ouest». Ce désarroi envers le mode de vie occidental est palpable dans Good Bye Lenin. Au début du film, la mère reçoit le prix du mérite pour son engagement au service du socialisme et son fils est fasciné par l’épopée des cosmonautes est-allemands, qui sont partis dans l’espace avec des engins soviétiques comme le héros de sa jeunesse Sigmund Jähn… Il fait d’ailleurs partie d’un groupe de jeunes constructeurs de fusée. Quand la RDA fête les 40 ans du régime, Alex se montre goguenard et ironique, alors que les chars défilent sous leurs fenêtres. Quelque temps plus tard, il participe à une manifestation pour demander des réformes et l’ouverture des frontières. Même la mère d’Alex se montre critique : elle passe son temps à rédiger des lettres de réclamations auprès des autorités… Mais après la chute du Mur et alors que la réunification est en marche, plusieurs personnages du film sont déconcertés devant l’ampleur des changements : l’ancien directeur d’école noie son chagrin dans l’alcool et quand Alex se rend à Berlin-Ouest pour la première fois, il est abasourdi quand il découvre les fast-food et les sex-shops, bref l’opulence capitaliste…
Cette prise de distance vis à vis de l’Ouest s’est traduite par un retour à d’anciennes habitudes de consommation : «si après le tournant, les Allemands de l’Est se sont empressés d’échanger de mobilier et d’acquérir les gadgets étalés par la société de consommation, ils reviennent maintenant à leurs anciens objets d’usage, tout simplement parce qu’ils sont plus résistants , -chaises,lampes mais aussi vêtements»… On n’est pas si loin de la situation imaginée par Alex avec son ami dans le film Good Bye Lenin : les berlinois de l’Ouest franchissant le mur vers l’Est pour profiter des avantages du système économique de la RDA…
Aussi, le film de Wolfgang Becker est sans doute plus qu’un symptôme d’une nostalgie artificielle pour la RDA. A sa manière, il relève du «travail de mémoire» des Allemands sur leur propre histoire : le réalisateur estime qu’il va permettre à la population de l’ancienne Allemagne de l’Est «à ne plus avoir honte de son passé, à réaliser que celui-ci ne pouvait plus être caché». Il devrait aussi faciliter le rapprochement entre Ossis et Wessis, qui se sont retrouvés pour applaudir le film : comme l’écrit le Frankfurter Allgemeine Zeitung, «le fait que tous-l’irréductible nostalgique de la RDA, la jeune génération qui ne l’a connue qu’enfant ou les Allemands de l’Ouest qui n’y étaient jamais allés-puissent en rire montre bien que l’Allemagne se réunifie vraiment». Et le journal de titrer : «Good Bye Lenin, le film qui réunifie les Allemands». Vision trop optimiste? En tout cas, la prise de conscience des Allemands, quelque soit leur origine, qu’ils partagent un même espace mais aussi une même histoire.